Il est facile de comparer mon accouchement à une course automobile. Toutes les étapes se ressemblent en tout point à l’exception de la vitesse! Il y a d’abord les essais libres, les qualifications, puis la course en tant que telle.
Les essais libres
Pour ce qui est des essais libres, on peut dire qu’ils se sont échelonnés sur trois longues semaines. Chaque deux ou trois jours, j’avais une séquence de quatre à six heures de contractions, histoire de faire avancer progressivement le travail, mais aussi de drainer mon énergie. Tous ces spasmes utérins ont servi à faire l’orchestration de l’équipe mécanique afin d’organiser les à-côtés de la course. Nous avons dû tous nous coordonner : la pilote, le directeur/papa, les mécaniciens/grands-parents, le petit mécano/Lili, etc. Bref, ces nombreux faux départs ont fait en sorte de s’assurer que la mécanique fonctionne comme sur des roulettes.
Il y a également eu quelques mises au point facilitatrices pour faire en sorte de tonifier la matrice et, en contrepartie, de ramollir le col de l’utérus. La prise quotidienne d’huile d’onagre et de tisanes de framboisier, les exercices d’autohypnose et de ballon, la visualisation du plan de match de la course, de la marche, du yoga, des positions accroupies, des visites chez l’acuponctrice, les colle-colle entre amoureux et l’utilisation du tire-lait et du TENS en sont de bons exemples.
Les séances de qualification
Viennent ensuite les séances de qualification. Le jeudi 2 septembre, mon médecin/arbitre m’a annoncé que mon col était effacé à 70 % et dilaté de 3,5 cm. Elle m’a tout bonnement lancé la phrase suivante : « Ça sent l’accouchement; c’est écrit dans ton vagin. » Elle a donc pu me faire un stripping, histoire de faire bouger les choses. Il faut dire que ma date prévue (possible) d’accouchement est soit le 5 ou le 8 septembre. Suite à quelques palpations de sa part, elle m’a annoncé que j’aurais fort probablement un gros bébé et lorsque la poche des eaux se romprait, que ce serait tout un déluge. Bref, suite à ces quelques constats, je peux me préparer tout bonnement à la grande course de la vie en me rendant à la ligne de départ.
Le vendredi soir, j’ai ressenti de grosses crampes style menstruation. Toutefois, je n’en ai pas fait de cas, étant donné les nombreuses séances de contractions que j’ai déjà subies.
Un samedi matin, soit le 4 septembre, vers 7 h 30, j’ai perdu le reste de mon bouchon muqueux. Il s’agit d’une perte d’un gros amas de mucus teinté de sang brunâtre. Vers 8 h 00, je n’ai pas pris de chance de voir les choses débouler à une vitesse effarante. J’ai donc appelé mes parents pour les mettre au courant des développements, histoire de les mettre sur le qui-vive, parés à décoller au quart de tour. Pour me conforter dans mes intuitions, j’ai téléphoné à mon amie Valérie qui m’a avoué avoir vécu les premiers balbutiements de son accouchement de la sorte. À 8h45, pour faire décoller le bolide, j’ai pris une dose de nitro (c’est un secret). C’est franchement écœurant! Comme rien ne se passait, à 11 h 15, j’ai fait un arrêt au puits de ravitaillement pour consommer une seconde dose de nitro pour accélérer la cadence. Respectivement à 11 h 50 et 13 h 15, j’ai fait une vidange d’huile (diarrhée).
Vers 14 h 00, nous avons décidé d’un commun accord, Rémi et moi, de quitter la maison en direction de l’hôpital.
Cette course a eu lieu à deux endroits bien de chez nous. Il s’agit en fait de Pointe-aux-Trembles et de Lachenaie. Bien que ces deux municipalités québécoises ne soient pas aussi prestigieuses que celle de Daytona, la course a été aussi enlevante.
À 14 h 30, nous sommes arrivés sur la ligne de départ afin de faire un tour de réchauffement. J’ai donc subi un monitoring fœtal ainsi que deux évaluations du col. J’en étais à 5 cm et 80 % même si bébé n’était pas fixé. On m’a posé une voie ouverte, d’innombrables questions et effectuer des prélèvements avant de m’octroyer mon espace sur le paddock, soit la chambre A-218. À 15 h 00, tout se réchauffait. J’ai pris un premier bain tourbillon pour faire accentuer l’intensité de mes contractions.
La course
C’est à 16 h 30 que la course a réellement débuté. J’ai subi à cet instant un monitoring fœtal, qui par la grâce de notre infirmière, s’est déroulé sur le gros ballon. Il en a été de même pour chaque monitoring par la suite. On indiquait alors des contractions aux 2 minutes. À 17 h, j’avais besoin d’un plein d’essence. On m’a donc apporté une soupe que j’ai dévorée goulûment. À 17 h 35, c’est un nouveau monitoring qui a eu lieu. Durant ce temps, Rémi est allé chercher notre équipement technique, soit nos bagages. J’ai donc écouté les conseils d’une de mes entraîneuses, la Dre Nathalie Fiset, par le biais d’une bande audio portant sur l’autohypnose. À 18 h 15, j’ai pris un second bain suivi de près à 19 h 05 par une autre séance d’écoute simultanée des contractions utérines et du petit cœur de mon bébé. Lorsque j’étais sur le ballon, Rémi me pesait sur des points gâchette du sacrum afin de libérer des endorphines. Quel soulagement!
À 19 h 30, la gynécologue, la même qui a vu naître notre petite Lili, est venue discuter de la situation avec nous. Elle nous a confirmé que le bébé était quasi fixé, que mon col était dilaté à 5+ ou 6 et effacé à 80 %. J’ai donc arpenté les longs corridors de l’hôpital pendant une trentaine de minutes durant lesquelles j’en ai profité pour me ravitailler (muffin). À 20 h 10, afin de faire descendre ma puce pour ainsi la fixer, j’ai fait du ballon debout. On l’avait placé dans mon dos afin que je me berce aux doux rythmes et mouvements de mes contractions. Ensuite, la routine est revenue : monitoring, autohypnose, marche et bain. À 22 h 40, Dre Giguère a procédé à l’amniotomie afin de faire s’intensifier et rapprocher mes contractions. C’était tout un déluge, tel que prévu! Ensuite, c’était une autre séquence d’autohypnose, de repos, de marche et encore de repos.
Vers 1 h 20, la course a carrément changé de tempo. J’ai ressenti un genre de « pop » intérieur s’apparentant à un bouchon de champagne qui décolle sur un podium à la fin d’une course. Les contractions sont soudainement devenues plus fortes et plus rapprochées. Il faut croire que le fait d’avoir crevé mes eaux a aidé à ma cause. Je sentais que je me rapprochais enfin de la ligne d’arrivée. À 12 h 15, afin de me soulager un peu, j’ai pris un troisième bain. Par contre, ça n’a pas tout à fait eu l’effet escompté. À cause de la chaleur, j’ai eu mal au cœur. D’ailleurs, en rebroussant chemin vers la chambre, j’ai vomi de la bile à quelques reprises. C’est à cet instant que j’ai demandé à ce qu’on m’administre du Fentanyl, un morphinique, afin de permettre à mon corps de se décrisper. À 3 h 15, pour rendre mes contractions plus efficaces, on m’a injecté une petite dose d’ocytocine. Dès lors, je me suis mise à délirer. « Pou pou faisait le bateau! J’ai envie de pipi! » Bref, je perdais le contrôle et n’étais plus apte à reprendre le dessus. Suite à ce constat, à 3 h 55, j’ai sérieusement demandé à avoir la péridurale, ce qui a été fait à 4 h 30.
À 6 h, on est venu m’examiner afin de voir l’évolution de travail. Surprise! La péridurale a permis de me détendre de faire évoluer les choses. Conclusion : mon col était complètement effacé et dilaté. Le branle-bas de combat du dernier tour s’est enclenché.
De 6 h à 6 h 10, notre infirmière et notre médecin ont préparé leur matériel. À 6 h 10 ont débuté les poussées. J’étais si heureuse de pousser avec le ballon dans mon dos puis avec des coussins afin de ne pas pousser en position traditionnelle. Cela a été possible grâce à l’anesthésiste qui m’éjecté qu’une faible dose de médicament me rendant alors plus mobile. Au bout de 20 minutes de poussées, je suis allée quérir ma petite puce, mon trésor, comme une fleur que l’on cueille avec délicatesse. La petite perle, Fanny Dumais, est née le 5 septembre 2010 à 6 h 30. Elle pesait 8 lb 14 onces et mesurait 22 pouces. Papa Rémi et maman Nancy pleuraient de joie. La course se terminait sur une belle victoire, celle de voir naître la vie. À 6 h 39, la petite cabine de pilotage de Fanny, en l’occurrence le placenta, est sorti de sa cachette. S’en est suivie une séance de peau à peau avec maman ainsi qu’une première mise au sein 7 h 30.
À la fin de cette course, même les journalistes étrangers se sont empressés de commenter cet événement sportif. Ils ont mis en évidence les propos tenus par la pilote du bolide/bedon. « She was right on time. We were expecting her for September 5th or 8th and she was born the 5th. The nature is amazing. I will always remember that I was in labour during the Labour Day week end. I’m not a pregNancy anymore! LOL!
Laisser un commentaire